Arrête avec tes mensonges : le best-seller de Philippe Besson adapté au cinéma

Vendu à plus de 100 000 exemplaires, “Arrête avec tes mensonges” de Philippe Besson va faire l’objet d’une adaptation au cinéma par le réalisateur d'”Une vie ailleurs” et “Comment j’ai détesté les maths”. Entretien avec Philippe Besson.

15 ans après Son frère, adapté et mis en scène par Patrice Chéreau, deux autres romans de Philippe Besson vont bientôt faire l’objet d’adaptations au cinéma : il s’agit de En l’absence des hommes (édité chez Julliard, 2001), premier roman de Philippe Besson, et Arrête avec tes mensonges, son dernier livre, paru en début d’année, également chez Julliard, best-seller, vendu à plus de 100 000 exemplaires. A l’occasion du Festival du film francophone, dont il était membre du jury, Philippe Besson nous a accordé un entretien dans lequel il nous en dit plus sur ces deux projets et, plus largement, la place qu’occupe le cinéma dans sa vie.

AlloCiné : Avez-vous reçu des propositions pour porter Arrête avec tes mensonges sur grand écran?

Philippe Besson, romancier et scénariste : Il y a plusieurs propositions qui nous sont parvenues et finalement j’ai choisi, pas forcément celle qui était la plus évidente. Peut être que d’autres que moi auraient choisi quelqu’un d’autre. J’ai choisi un réalisateur que je ne connaissais pas du tout, et qui a lu le livre tout de suite, dès sa sortie. On ne se connaissait pas. Il a cherché à me joindre dès les premiers jours. Ca veut dire que ce n’est pas quelqu’un qui a attendu le succès du livre. Le livre a connu un gros succès. Il y avait une espèce de sincérité absolue dans sa démarche.

Il y avait une espèce de sincérité absolue dans sa démarche

Il ne savait pas le destin qui attendait le livre et moi non plus évidemment à ce moment là. Il est venu très vite. D’autres sont venus après. J’ai aimé sa démarche. Il s’appelle Olivier Peyon. Il a fait deux-trois films notamment Une vie ailleurs, avec Isabelle Carré, et qui avait fait le documentaire Comment j’ai détesté les maths. J’ai été intéressé par son regard et la façon dont il me disait l’émotion que lui avait procuré le livre. Donc voilà, Olivier Peyon est en train d’écrire en ce moment le scénario de ce film.

Allez-vous participer au scénario ?

Pas du tout. Pour une raison simple : je pense que l’écriture d’un film et l’écriture d’un livre sont deux exercices qui n’ont rien à voir. Et surtout je trouve que les écrivains sont souvent les plus mauvais adaptateurs de leurs propres livres parce qu’ils ont tendance à vouloir être les gardiens du temple. Ils sont surtout incapables de se trahir. Or je pense que les meilleures adaptations sont les plus belles trahisons.

Il faut savoir prendre la distance avec le livre

Il faut savoir prendre la distance avec le livre. Le livre et le film sont deux objets différents. Faire un copier-coller d’un livre au cinéma est souvent assez raté. Et puis il faut surtout permettre que le réalisateur, s’il est aussi scénariste, colle son propre univers, ses propres névroses, ses propres obsessions, ses propres désirs que je ne connais pas et dans lesquels je n’ai pas à entrer. Je suis très jaloux de ma liberté de création et d’écriture. Je ne pense pas qu’il faille empiéter sur la liberté de création et d’écriture d’un autre. J’aime écrire des films qui ne sont jamais tirés de mes livres, des histoires originales ou des adaptations d’autres. Mais je n’ai pas envie forcément d’adapter mes propres livres.

Outre Son frère par Patrice Chéreau, à ma connaissance, il n’y a pas d’autres de vos livres qui ont été adaptés…

Il y a les droits d’un autre livre qui viennent d’être achetés, de mon premier livre, qui s’appelle En l’absence des hommes, qui se passe pendant la Première guerre mondiale. Ca me brûle les lèvres mais je n’ai pas le droit de dire qui le fera.

Cela sous-entend que c’est quelqu’un de très connu…

Oui.

Quel spectateur de cinéma êtes-vous ? Regardez-vous beaucoup de films en temps normal ?

Oui. D’abord, ça suppose un tout petit retour aux origines, et c’est d’ailleurs ce que je raconte dans Au revoir avec tes mensonges, je suis un enfant de la campagne. Jusqu’à l’âge de 12 ans, je n’ai quasiment pas vu de films et pas vu la télévision, parce que chez moi on n’a pas le droit de la regarder, parce qu’à 8h30 il faut que les enfants aillent se coucher. Ce sont les années 70-80, il n’y a pas Internet. Je suis un enfant qui vit en dehors du monde. Jusqu’à l’âge de 12 ans, l’actualité n’existe pas, les films n’existent pas. Par exemple, je n’ai vu aucun Disney dans mon enfance. C’est un village de 160 habitants. A 12 ans, on déménage dans la grande ville, Barbezieux, 4500 habitants, mais qui a l’avantage d’avoir un cinéma qui vient d’ouvrir. Il s’appelle Le Club, il existe encore aujourd’hui. Là, c’est un choc très violent, car je vais me mettre à aller au cinéma tout le temps. Il y a 4 films par semaine et je vais voir les 4 et j’ai vu des daubes ! Je deviens non pas un cinéphile, mais un cinéphage, un grand consommateur de films. Je vais rattraper beaucoup mon retard en voyant des films à la télé aussi bien sûr.

J’ai trouvé Moonlight extraordinaire, sans doute parce que cela avait des résonnances avec ma propre intimité

Je suis emballé par le cinéma parce que ça me raconte une histoire. On me raconte le monde par ce biais là. Au fond, je pense que je suis devenu écrivain grâce au cinéma. C’est à dire que le goût de raconter des histoires vient aussi de là, des films. Après, évidemment, avec la vie, j’ai appris comme tout le monde à orienter mes goûts. Je suis allé vers un type de cinéma, un peu moins vers un autre. Aujourd’hui, il y a des cinéastes que je suis et dont je vais voir les films presque systématiquement. J’ai des curiosités, j’ai des coups de cœur. J’attends d’être surpris par des choses.

Le cinéma occupe une place importante. Je suis curieux de découvrir des choses. Ce midi, on faisait une sorte de bilan des films qu’on avait aimé au cours des 12 derniers mois et je me dis que les films qui surnagent sont Manchester By The Sea, qui m’a marqué, ému, troublé, dévasté, au-delà de l’interprétation de Casey Affleck. J’étais très touché par ce film. Moonlight que j’ai trouvé extraordinaire sans doute parce que cela avait des résonnances avec ma propre intimité. J’ai beaucoup aimé aussi Juste la fin du monde de Xavier Dolan, sans doute parce que je connaissais la pièce de Lagarce. J’étais très bluffé par la virtuosité de la réalisation et de l’interprétation, et par la puissance de cette histoire. Ce sont toujours des moments incroyables quand on est dans une salle et qu’il se passe un truc. J’attends ça, qu’il se passe un truc.

Vous allez avoir une rentrée chargée avec la sortie d’un nouveau livre. Vous avez suivi Emmanuel Macron pendant sa campagne. Pendant combien de temps l’avez-vous suivi ?

Pendant 9 mois à peu près, du mois d’août 2016 jusqu’au mois de juin 2017. C’est un récit totalement subjectif. Je ne suis pas journaliste, ce n’est pas du tout un livre de journaliste. J’ai essayé de faire un livre d’écrivain. C’est un regard subjectif, un portrait intime, une chronique de ce qu’il s’est produit, avec la stupéfaction qui a été la mienne de voir cette chose impossible devenir tout à coup probable, puis plausible, puis réelle. C’est ce cheminement, cette épiphanie, cette consécration qui relève pour moi du pur romanesque. C’est le surgissement de l’inattendu. C’est un personnage qui s’est inventé un destin. D’ailleurs le livre s’appelle Un personnage de roman.

La chance que j’ai est que j’avais une grande accessibilité à Emmanuel Macron car je le connaissais avant et parce que je lui ai demandé. Il l’a permis et je pense qu’il y a dans le livre des choses qui sont ce qui n’a pas été vu, de l’ordre de l’invisible. On a eu beaucoup de têtes à têtes dans lequel je lui demandais de regarder sa campagne avec recul donc il y a beaucoup de verbatim aussi dans le livre.

La bande-annonce d’Une vie ailleurs, précédent long métrage d’Olivier Peyon :

Une Vie Ailleurs Bande-annonce VF

 

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